C’est l’un des principaux freins au développement de ce mode de transport vertueux : en ville, un cycliste sur deux s’est déjà fait dérober sa monture. L’an dernier, quelque 500 000 vélos ont été déclarés volés. D’où l’arrivée de nouveaux moyens pour se protéger.
Trente-cinq secondes. C’est le temps qu’il faut pour scier un antivol à la disqueuse ! L’association Guidoline a mené l’expérience à Rouen (Seine-Maritime) de découper, montre en main, des cadenas pour démontrer qu’«un antivol n’empêchera jamais un vol», selon Simon Larchevêque, son président. «Nous souhaitons attirer l’attention du public sur la nécessité de bien s’équiper.» La pratique du vélo en ville comme mode de déplacement écolo attire pourtant un nombre croissant de fans, comme en atteste le nouveau Paris Bike Festival qui se tient ce week-end*. Mais le militant s’inquiète de la recrudescence de vols : «C’est un des freins au développement de ce mode de transport.» En ville, un cycliste sur deux s’est déjà fait dérober au moins un vélo.
Dans l’atelier de réparation qu’il a fondé en 2010, Simon Larchevêque rappelle l’utilité d’un bon système d’accrochage. «Nos adhérents se font piquer leur vélo trois ou quatre fois de suite ! Certains renoncent, ou s’en rachètent un moins beau mais pourri, qui leur fait mal au dos.» Selon une enquête du CNRS, près de 80 000 cyclistes renonceraient chaque année au vélo, à cause du vol.
VIDEO. Vols de vélos : comment les éviter
Un phénomène sous-estimé
Environ 500 000 vélos ont été déclarés volés l’an dernier, soit 1 369 par jour. Un chiffre qui est pourtant certainement bien en dessous de la réalité. « On s’est fait voler 4 vélos en un an, raconte Olivier, père de famille et cycliste aux Lilas (Seine-Saint-Denis). Je n’en ai jamais déclaré un seul au commissariat, car ça ne sert à rien ! » C’est un tort : selon l’association Vélo perdu, 100 000 bicyclettes sont retrouvées chaque année en France, sans pouvoir être restituées à leur propriétaire la plupart du temps faute d’identification. La deuxième raison de cette sous-estimation est liée à la non-déclaration de vol aux assurances. La faute aux clauses particulièrement restrictives pour être remboursé : vol de nuit sur la voie publique, vol sur ou dans un véhicule, vélo non attaché… Seulement 1 % des cyclistes souscrivent une assurance spécifique pour leur vélo.
Que l’on se rassure, les Français sont nombreux à avoir adopté ce mode de déplacement qui fait respirer nos villes : 40 % de la population pédale régulièrement. En 2016, la barre des 3 millions de vélos vendus a été franchie, grâce au boom des électriques et du libre-service.
La communauté cycliste s’organise
Sur les réseaux sociaux, la communauté cycliste s’organise et crée des pages «vélos volés» où sont postées les images de leurs chers engins envolés. «A Rouen, 250 annonces sont passées depuis un an. On a pris le réflexe de surveiller, surtout ceux qui dépendent de leur vélo pour le travail», se félicite Simon Larchevêque. Hier encore, un vélo venait d’être retrouvé grâce à la vigilance des internautes locaux. Sur la page de l’association Paris Chill Racing, les mordus échangent leurs bons plans. «Vu le nombre de vols de vélos dont le mien, qui était accroché dans une cour fermée, mieux vaut le garer dans l’appart», prévient Paul. Et l’on voit les vélos fleurir sur les balcons.
La conclusion du test mené par Guidoline confirme qu’un antivol ne résiste pas à un voleur muni des bons outils, heureusement pas à la portée de tous. «On vient à bout de n’importe quel type de U avec une perceuse, une scie sauteuse ou une disqueuse», atteste Simon Larchevêque. Alors, il faut adopter les bons réflexes. «Les antivols flexibles en spirale sont à éviter», conseille-t-il. Et toujours accrocher son deux-roues à un point fixé au sol. «Mais pas à un tronc d’arbre fin, que certains n’hésiteront pas à scier», reprend-il. Des solutions high-tech arrivent aussi.
Les cyclistes peuvent également compter sur les villes, de plus en plus conscientes de l’enjeu de la bicyclette dans les transports. A Rouen, des parkings à vélo sécurisés doivent voir le jour cet été, sur le modèle de ceux de Grenoble (Isère), ville pionnière en matière du vélo roi.
*Paris Bike Festival, ce samedi de 9 heures à 20 heures et dimanche de 9 heures à 18 heures, hippodrome de Longchamp (XVIe). Entrée : 12 €, 6 € (10-18 ans), gratuit (-10 ans). Consigne à vélo surveillée 2 €.
Les meilleures parades
S’il n’y a pas de solution miracle contre le vol, plusieurs innovations permettent désormais de s’en prémunir.
Géolocaliser son engin. Ce système relié à une application permet au propriétaire du vélo de « tracker » son engin grâce à une puce Bluetooth ou NFC, cachée sous la selle ou sous le guidon. Attention, à plus de 200 m, on est hors de portée. A noter, le système Trackr envoie les coordonnées du vélo au propriétaire de la puce dès qu’un autre utilisateur passe à proximité. Le nombre d’utilisateurs fait donc la différence. On retrouve ce concept de trackeur dans le guidon connecté développé par la start-up nantaise Velco. A partir de 26 €.
www.thetrackr.com.
Faire graver son vélo. Le marquage Bicycode consiste à graver sur le cadre des vélos un numéro unique, référencé dans un fichier national disponible en ligne. Ce dispositif reconnu par l’Etat vise à la restitution des vélos volés par les forces de l’ordre, ainsi qu’à éviter leur revente. Sur le site, une carte interactive indique où faire apposer l’autocollant bleu inoxydable sur son tube de selle. Entre 5 et 10 €.
www.bicycode.org.
Intoxiquer le voleur. Parce qu’il en avait marre de se faire voler son vélo, un Californien a inventé le Skunk Lock. Un modèle d’antivol dont le nom signifie « putois » en anglais. Le tube de ce cadenas en carbone et en forme de U renferme un gaz nauséabond qu’il dégage s’il est scié. « Il s’avère être un puissant vomitif pour qui le respire dès 1 m de distance », selon l’inventeur, qui vient de lever 60 000 € pour commercialiser son antivol piégé. 108 € hors livraison.
www.skunklock.com.
Le Parisien