On les voit sillonner depuis plusieurs mois les rues de Paris, Nantes ou Rennes. Qui sont les coursiers, ces autoentrepreneurs, qui livrent à vélo des repas à domicile. Sont-ils vraiment indépendants ? Combien gagnent-ils ? Ouest France répond à ces questions.
Comment expliquer la floraison de coursiers à vélo ?
Elle est liée à l’émergence d’entreprises comme la britannique Deliveroo, l’allemande Foodora, l’américaine UberEats etc. Elles facilitent la livraison de repas à domicile en ville, sans salarier de livreurs. Ces derniers sont des indépendants, payés à la course. L’entreprise « se borne » à les mettre en relation, par le biais de son site Internet, avec le client qui passe commande et le restaurant qui concocte le plat.
Une activité prometteuse aux yeux des fonds d’investissement qui ont misé 254 millions d’euros dans Deliveroo, l’an dernier. La maison mère de Foodora pèse, elle, trois milliards !
Pourquoi le vélo ?
C’est le moyen de transport « le plus rapide dans les grandes villes », observe Boris Mittermüller, le directeur France de Foodora. Autre avantage, la souplesse de la réglementation. Pas besoin d’effectuer les 105 heures de formation nécessaires pour obtenir la capacité de transport, exigée pour les livraisons motorisées. Les entreprises s’assurent seulement que les coursiers ont bien le statut d’auto-entrepreneur.
Combien gagnent les coursiers ?
Chez Deliveroo, c’est 5 € par course. Chez Foodora, 7,50 € de l’heure, plus 2 à 4 € par livraison, avec un bonus week-end ou pluie.
Et les plateformes ?
Deliveroo et Foodora prélèvent 30 % de la valeur du repas auprès du restaurateur. Et 2,50 € auprès du client.
Les coursiers sont-ils vraiment indépendants ?
Ils arborent les couleurs de la plateforme, sont dépendants de tarifications, s’insèrent dans un planning… Beaucoup de points communs avec des salariés.
Si bien qu’à Nantes, l’Inspection du travail a dressé des PV pour travail dissimulé. « Il n’y a aucun lien de subordination », rétorque Deliveroo. « Les coursiers ont une liberté totale. Ils choisissent quand ils veulent travailler. » « Ils sont nombreux à travailler avec nous et avec nos concurrents », renchérit Foodora. « Il n’y a pas d’exclusivité. »
Qu’en pensent les employeurs qui, eux, salarient leurs livreurs ?
Ils l’ont mauvaise… « Avant, il ne s’agissait que de livraison de repas », note Antoine Cardon, du Syndicat national des transports légers (SNTL), qui représente 5 000 salariés. « Mais des plateformes se lancent dans tous types de livraisons. » Allusion à la société Stuart, récemment rachetée par La Poste. Elle met en relation des entreprises, comme Carrefour ou Zalando, avec des coursiers.
« Faire appel à des autoentrepreneurs permet de réduire les charges de 30 % », calcule Antoine Cardon. « Ça casse les prix. » Le SNTL a saisi le tribunal de commerce, soupçonnant certains coursiers d’être motorisés sans agrément.
« 80 % de nos coursiers sont à vélo, les autres ont la capacité de transport », réplique Nicolas Breuil, le directeur marketing de Stuart. « Le vélo, c’est plus écologique que les 100 000 camionnettes de livraison qui sillonnent Paris. C’est l’avenir. »